Face au mal-logement, l’Europe à la traîne ?
- Naila Khelifi
- 13 oct.
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© Shutterstock.com- Publié le 09 octobre 2025- Ecrit par Brickly avec AFP
Loyers hors de prix, logements surpeuplés... Face à une crise qui s’aggrave, deux associations appellent l’Union européenne à adopter un plan crédible contre le mal-logement.
Hausse du nombre de sans-abri dans certains pays, explosion du prix des logements, 34 millions de ménages dans des logements suroccupés: face à une crise qui ne faiblit pas, deux associations appellent l'Union européenne à établir un "plan crédible" de lutte contre le mal-logement.
Les tendances sont "inquiétantes", le nombre de sans-abris progresse dans différents pays européens, notamment en Finlande, au Danemark et en Irlande, constatent la Fédération européenne des associations nationales travaillant avec les sans-abri (Feantsa) et la Fondation pour le logement des défavorisés, dans un rapport publié le 9 octobre.
Près d'1,3 million de personnes sans-abris dans l'UE
Au total, les associations dénombrent près d'1,3 million de personnes sans-abris dans l'UE. En France, environ 350 000 personnes sont sans domicile fixe, dont environ 20 000 à la rue, selon ce rapport.
Quant aux logements, leurs prix à l'achat ont bondi de 38,8% et les loyers ont progressé de 14,4% dans l'UE depuis 2018.
Les loyers médians sont si chers dans de nombreuses villes qu'aucun des six profils types de ménages modestes (personne seule avec une retraite moyenne, famille monoparentale au salaire minimum, par exemple) ne peuvent se loger sans dépasser le seuil de 33% des revenus dépensés dans le logement.
Selon les calculs de la Fondation pour le logement et de la Feantsa, c'est le cas à Berlin, Madrid, Rome, Paris, Amsterdam, ou encore à Dublin, où le loyer médian au mètre carré atteint 31,5 euros.
Enjeu de dignité
"Plus qu'une crise du logement" c'est "une crise sociale", selon la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, qui a déclaré début septembre lors de son discours sur l'état de l'Union qu'il s'agit d'un enjeu de "dignité", d'"équité" et de "l'avenir de l'Europe". Elle a lancé des travaux en 2024 pour élaborer le "tout premier Plan européen pour un logement abordable", attendu d'ici la fin de l'année.
Les pays de l'UE s'étaient aussi fixé en 2022 un objectif "idéal" de zéro personne à la rue en 2030. Pour la Fédération européenne et la Fondation pour le logement, cet objectif "est difficilement atteignable, peut-être pas réaliste", a estimé jeudi lors d'une conférence de presse en ligne Margaux Charbonnier, chargée de projet à la Feantsa. Toutefois, "même si on n'est pas sur la bonne voie, ce n'est pas une raison pour renoncer, cela doit inciter à redoubler d'efforts, à construire une feuille de route plus réaliste".
Malgré la promesse du président français Emmanuel Macron que plus personne ne dormirait dans la rue d'ici 2022, le nombre de sans-abris en France a progressé et ce public s'est diversifié, avec une présence croissante de femmes et d'enfants (plus de 2 000 à fin août), selon des associations.
Les deux associations espèrent des mesures contre le sans-abrisme dans le futur plan européen, mais le terme même de "logement abordable" pose question. Cette notion "peut parfois tout dire et rien dire car elle très consensuelle et très vague", a estimé Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation pour le logement.
Leur crainte est de voir le plan européen financer des logements dédiés aux classes moyennes, ce qui ferait moins de soutien au logement des ménages à bas revenus.
Un locataire sur cinq assommé par son loyer
En 2024, plus de 16,5 millions de ménages européens dépensaient plus de 40% de leur revenu dans leur logement (seuil appelé taux d'effort excessif), soit 8,2% des ménages de l'UE, selon le rapport, qui reprend des données d'Eurostat.
Et parmi les locataires du secteur privé, un ménage sur cinq présente un taux d'effort excessif.
Les 20% de ménages les plus pauvres concentrent les difficultés, selon les associations, qui relèvent que 27,8% d'entre eux ont un taux d'effort excessif.
"Le plan européen doit protéger et soutenir le logement social, qui est sous pression dans certains pays", a défendu Ruth Owen, directrice adjointe de la Fédération européenne, qui craint de voir le logement social "dilué".
Autre inquiétude, l'appel "aux investisseurs privés" qui risquent de vouloir "une rentabilité financière suffisante" au détriment des locataires, a pointé Sarah Coupechoux, responsable de la mission Europe à la Fondation pour le logement.






















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